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 Dossier - Mai 2012

La protection foudre,
c’est l’assurance tout risque des électriciens


Michel Koutmatzoff Edito

"Parafoudres : pour les centrales photovoltaïques et les éoliennes aussi"

Dans l’installation électrique, les dispositions de protection auxquelles on prête attention en premier lieu concernent la protection contre les chocs électriques (protection des personnes) et la protection contre les surintensités (protection contre les échauffements et les risques d’incendie), mais il est également indispensable de se préoccuper de la protection contre les surtensions d’origine atmosphérique.
Les phénomènes orageux que nous rencontrons principalement en période estivale peuvent avoir des conséquences fatales pour les personnes et désastreuses pour les biens : risque de foudroiement des personnes, risque de dégâts pour les bâtiments non protégés contre les impacts de foudre, et risque de destruction de matériels provoquée par les surtensions d’origine atmosphérique se propageant le long des lignes électriques.
Cette dernière protection est assurée par les parafoudres, parfois également nommés para-surtenseurs, leur mise en œuvre dans les installations est obligatoire dans les départements les plus foudroyés. Elle est réalisée depuis plusieurs années sans poser de problème, bien que demandant un choix précis des caractéristiques des produits et une installation rigoureuse pour obtenir une protection efficace des matériels. Cette protection peut nécessiter la mise en cascade de plusieurs parafoudres pour être parfaitement efficace, le deuxième parafoudre étant situé le plus souvent près du matériel à protéger. Il convient également de ne pas oublier la protection des installations de communication, car les surtensions d’origine atmosphérique ne se font pas faute d’arriver par ces réseaux. Notons que dans le cas de matériels particulièrement sensibles aux surtensions, notamment à cause de l’électronique, une protection peut être souhaitable, alors même qu’il n’y a pas d’obligation de mise en œuvre de parafoudres.
Par ailleurs, le développement des installations photovoltaïques a fait apparaître un nouveau besoin : des parafoudres pour installation à courant continu dont la mise en œuvre est obligatoire dans les départements les plus foudroyés, comme pour les parafoudres sur les installations d’énergie en courant alternatif. Cette catégorie de parafoudres a dû être développée rapidement pour répondre à la demande, et pour cela, il a fallu créer des produits adaptés aux caractéristiques particulières des installations photovoltaïques. Dans ce domaine, la France a été la première à rédiger et à publier une norme pour les parafoudres courant continu, document ayant ensuite constitué la base des travaux européens et internationaux sur ce sujet. Ainsi, les derniers documents normatifs concernant les installations photovoltaïques prennent en compte la protection contre les surtensions d’origine atmosphérique en imposant des parafoudres courant continu.
Pour la protection des bâtiments contre les impacts directs de foudre, les règles à appliquer figurent dans les normes d’installation de paratonnerres de la série NF EN 62305, ou NF C 17-102 dans le cas de paratonnerres à dispositif d’amorçage.
Enfin, pour les principes de protection des personnes, il est conseillé d’appliquer les 20 recommandations de l’Association Protection Foudre (association loi de 1901 visant à informer le grand public sur le phénomène physique et les comportements à adopter), ainsi que ses fiches conseil portant sur différentes activités : la foudre en mer, la foudre en montagne, le camping et la foudre (1)

Michel Koutmatzoff,
Président de l’Association Protection Foudre


(1) Téléchargeables à partir du site : www.apfoudre.com


La protection foudre,
c’est l’assurance tout risque des électriciens


La protection des réseaux électriques contre les surtensions dues à la foudre… Telle est la vocation des parafoudres (ou parasurtenseurs) destinés à limiter les surtensions transitoires et à écouler les courants de foudre.

 

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Chaque année, le territoire français reçoit entre un et deux millions de coups de foudre, 40 personnes sont foudroyées, dont une quinzaine mortellement, ainsi que 20 000 animaux. Les dégâts économiques sont considérables. « La plupart des effets de la foudre sont parfaitement visibles : éclairs, tonnerre, dégâts matériels, mais les manifestations électriques sont généralement peu perceptibles », admet Denis Marquet, gérant d’offres parafoudres pour la France, Schneider Electric, pour qui, « chacune de ces manifestations provoque des surtensions qui exposent les installations électriques à un risque de dysfonctionnement, de destruction de matériels, d’indisponibilité des outils de production ». Gilles Sirmain, responsable Marketing Division EDIA Legrand, précise : « la foudre génère de multiples effets : thermique (fusion, incendie), électrodynamique (desserrage de bornes), montée du potentiel de terre (risque d’électrocution), des surtensions de plusieurs milliers de volts et des courants induits destructeurs (destruction d’équipements, pertes d’exploitation) ».
Les éclairs produisent une énergie électrique impulsionnelle extrêmement importante : des milliers d’ampères (et plusieurs milliers de volts), haute fréquence (de l’ordre du mégahertz), courte durée (de la microseconde à la milliseconde).


Les installations électriques sont impactées :

  • par coup de foudre direct sur une ligne électrique aérienne. La surintensité et la surtension peuvent se propager à plusieurs kilomètres du point d’impact ;
  • par coup de foudre à proximité d’une ligne électrique. Le rayonnement électromagnétique induit un fort courant et une surtension dans la ligne ;
  • par coup de foudre à proximité des bâtiments : la terre est chargée et monte en potentiel. Le réseau étant à un potentiel plus bas, se crée un courant qui traverse l’installation électrique en entrant par la terre.

Soule Parafoudre debrochableSoule Parafoudre integrable portails arrosageABB Parafoudre photovoltaique type1Dans l’approche globale, la protection ne peut être efficace et fiable que lorsque tous les phénomènes sont pris en compte pour se prémunir contre les atteintes directes de la foudre et les effets indirects… Mais aussi les défauts de terre et l’établissement de différences de potentiels dangereux entre points voisins de l’installation. « Elle suppose l’analyse du risque, les études pour définir les dispositifs de protection appropriés à chaque situation, l’installation des dispositifs de protection selon les règles de l’art, la réception finale de l’installation », commente Yannick Henaff, directeur général, Franklin.

 


 

 

Gare aux surtensions !
Autrefois, les composants et appareils électromécaniques étaient beaucoup moins sensibles aux effets de la foudre que les appareils électroniques modernes : PC, télévisions, Hi-Fi, domotique… Pour Gilles Sirmain (Legrand), « la philosophie du parafoudre est très simple… C’est comme un disjoncteur entre câbles de phase et terre. En temps normal, le disjoncteur est ouvert. Qu’une surtension survienne, et le disjoncteur se ferme pour écouler le courant de foudre à la terre ». 


Hormis les multiprises terminales destinées au consommateur final, le marché des parafoudres se concentre sur les produits pour tableaux électriques mis en place par l’installateur. Le profil des fournisseurs se répartit entre :

  • les spécialistes de la protection globale (Adee, Citel, Dehn, Franklin qui offrent une large palette de références ;
  • les généralistes électriques comme ABB qui a racheté Soulé & Hélita en 2001, GE, Legrand, Schneider Electric…
  • des spécialistes d’un domaine particulier (Mersen, Phoenix Contact, Wago, Weidmüller…).

CITEL parafoudre type2 triphaseLes marchés couverts sont multiples : les réseaux électriques basse tension, certes, mais aussi les télécommunications, les réseaux informatiques, les câbles coaxiaux, ainsi que le photovoltaïque, l’éolien, et les marchés de niche : conduites (pétrole, gaz…), ferroviaire, réseaux en zone ATEX (pétrole, gaz, poudres, pharmacie…). Il est aussi un marché de la moyenne et de la haute tension couvert par des technologies et des fournisseurs différents.
Les parafoudres utilisés pour la protection des réseaux BT sont classés en type 1, type 2, type 3 qui définissent leurs positions dans l’installation. Ceux de type 1 sont obligatoires en présence d’un paratonnerre sur le site. Le type 2 correspond à une protection antisurtension pour faire face aux perturbations causées par des coups de foudre distants, des couplages inductifs ou capacitifs, par des surtensions de manœuvre. C’est le domaine des varistances. « Ils sont disponibles en versions débrochables, monoblocs, ou auto protégés (avec système de coupure intégré : fusible ou disjoncteur), et répondent à tous les régimes de neutre TT IT TNS TNC, en monophasé, comme en triphasé, triphasé + neutre » déclare Gaël Grenat, chef de produit Parafoudres et Fonctions Modulaires ABB. Certains appareils combinent type 1 et type 2, d’où gain de place et gain de prix.
Le parafoudre de type 3, constitué de varistances et d’éclateurs à gaz, est exclusivement réservé à la protection fine des récepteurs. Il se positionne au plus près des équipements : serveur informatique, automate de sécurité, coffret de détection incendie ou de désenfumage dans un établissement recevant du public... « Ces parafoudres commencent à être installés sur les détecteurs, les systèmes anti-intrusion, les caméras de vidéosurveillance, les variateurs de vitesse… », note Régis Reeb responsable marketing et support technique, Dehn France.

 


 

 

Mille autres usages encore
Eaton Protection Box PB5Il existe aussi des protections en courant faible pour les arrivées téléphoniques, télécoms et l’ADSL : prises OVR TC d’ABB, Eaton Protection Box normalisé IEC 61643-1… « Notre gamme de produits généralistes est appréciée par les tableautiers et l’industrie, et par le marché résidentiel pour lequel sont offerts des blocs multiprises avec parafoudre intégré », confie Gaël Grenat (ABB) : « nous avons une gamme Soulé de produits spécialistes destinés au marché résidentiel : parafoudres autoprotégés et débrochables, parafoudres terminaux intégrés dans les portails, systèmes d’arrosage, goulottes multiprises… ».
Le CPL (Courant Porteur en Ligne) est utilisé par les particuliers comme dans les entreprises pour transporter le signal informatique via le réseau électrique. « Le parafoudre terminal bloque le signal », commente Laurent Badiali, channel marketing manager, Eaton France : « des filtres spécifiques permettent au CPL de jouer son rôle sur une prise dédiée de façon à laisser passer les signaux en émission comme en réception ».
Du côté de chez Franklin, le Coaxstop est voué à protéger les équipements de transmission UHF raccordés aux réseaux coaxiaux.
Il existe aussi des parafoudres photovoltaïques (de type 2 et depuis cette année, de type 1) conformes au projet de norme FprEN 50539-11:2012. « Cette norme prévoit des essais en laboratoire beaucoup plus sévères, spécialement dans la simulation du comportement en fin de vie du parafoudre » explique Guy Lyonnet, directeur technique de Finder France : « ces tests ont conduit au développement et à la réalisation de nouvelles varistances plus performantes, et de nouveaux disjoncteurs thermiques ».
Des éoliennes offshore vont être implantées au large de nos rivages. La foudre pourrait les atteindre, endommager les circuits électriques, rendant ingérable l’instrumentation. « Ces équipements sensibles nécessitent d’être protégés contre la foudre » insiste Olivier Pellissier, responsable produits Trabtech, Phoenix Contact : « le Powertrab destiné à la protection des éoliennes, intègre une signalisation de pré-alarme d’usure… Un parafoudre de type 1 de très forte capacité, jusqu’à 100 kA en triphasé ».

 


 

 

Quelles caractéristiques pour les parafoudres ?
Schneider PB103181 SE« Une douzaine de caractéristiques techniques servent à définir les parafoudres », signale Christian Macanda (Citel), pour qui, « deux caractéristiques fonctionnelles sont essentielles pour évaluer l’efficacité du parafoudre : le courant de décharge nominale et le niveau de protection Up ».
Le courant de décharge nominale correspond à la capacité du parafoudre de type 1 ou 2 à écouler des ondes de foudre sans se détruire. Plus ce courant est élevé, plus le parafoudre est puissant.
Le niveau de protection Up est la capacité du parafoudre à limiter la surtension transitoire de façon à la rendre acceptable par l’équipement terminal. Plus l’Up est faible, plus le parafoudre est efficace.
Pour les parafoudres de type 1, il est aussi un critère de tenue aux ondes impulsionnelles de forme « 10/350 µs » représentant l’enveloppe moyenne des ondes de courant engendrées par un impact direct.

 

Tableau fabricants


 

 

Les technologies en présence
Socomec coff-pvDifférentes technologies cohabitent telles que les parafoudres à éclateurs à air encapsulé ou à gaz pour les protections de type 1, la technologie à varistance et les diodes pour les protections de type 2 et 3.
L’éclateur à gaz comporte deux électrodes séparées par un gaz (air ou gaz rare). Dans le cas des éclateurs encapsulés, les électrodes sont reliées par un tube isolant en verre ou en céramique. Selon Régis Reeb (Dehn), « l’éclateur présente l’avantage d’une faible résistance d’arc constituant pratiquement un court-circuit, ainsi qu’un grand pouvoir d’écoulement, une faible capacité parasite permettant la protection des lignes de signaux à très hautes fréquences ». L’inconvénient majeur ? Le temps requis pour ioniser le gaz. Un autre inconvénient est le courant de suite : lors d’un amorçage, l’arc électrique est maintenu par la tension du réseau jusqu’à ce que le courant s’annule. Ce courant de suite peut atteindre des valeurs importantes dans les installations industrielles et nécessite l’association d’un déconnecteur approprié.
La varistance est une résistance dont la valeur varie fortement avec la tension appliquée à ses bornes. Plus la tension est élevée, plus la résistance est faible : en présence d’une surtension, la varistance devient conductrice, évacue la surtension et le courant induit. Elle présente un temps de réponse inférieur à celui des éclateurs, de l’ordre de 25 ns, et pas de courant de suite. Gaël Grenat (ABB) dévoile : « une nouvelle technologie appelée QuickSafe est en préparation qui permettra de déclencher plus rapidement en cas de coup de foudre ».
La diode Zener est préconisée par ADEE Electronic dans ses composants Fusadee. « Elle est 1 000 fois plus rapide que son concurrent, la varistance », avance Dominique Girard, directeur technique : « ADEE est seule en France à préconiser cette technologie protégée par une vingtaine de brevets ». Ses quatre atouts :

  • elle protège efficacement un équipement contre les transitoires électriques rapides (quelques dizaines de nanosecondes) ;
  • le courant de crête maximal supporté sans détérioration du composant peut atteindre quelques centaines d’ampères et sa durée de vie est illimitée tant que ce courant n’est pas dépassé ;
  • la forte non-linéarité procure des tensions de protection plus basses ;
  • la fin de vie des diodes se fait toujours en court-circuit, ce qui permet d’obtenir des configurations à continuité de protection, quel que soit le type de surtension rencontrée.

Weidmuller VSPC« Nous sommes aussi les seuls à avoir un niveau de protection inférieur à 1 kV : en l’occurrence 0,8 kV, pour un courant nominal de décharge de 0,1 à 3 kA » insiste Dominique Girard. En présence d’une surtension forte et durable, on a affaire à un système sacrificiel : « le Fusadee fusionne, se met en court-circuit en des temps de l’ordre de la picoseconde, ce qui se traduit par la mort salvatrice du composant ».

 


 

 

Des options bien utiles
Finder 7PLa débrochabilité des parafoudres facilite la maintenance. En cas de nécessité de remplacement d’une cartouche usagée, nulle nécessité de couper le circuit électrique ni de déconnecter les fils.
Les parafoudres en fin de vie mettaient autrefois l’installation en court-circuit. Selon Nicolas Guyonneau, responsable produits, GE Energy, « aujourd’hui, les parafoudres se mettent en sécurité en fin de vie : ils n’engendrent plus de court-circuit sur l’installation ».
La réserve de sécurité est une option pour visualiser l’état du parafoudre grâce à un voyant mécanique de couleur : vert lorsque le parafoudre est en état de fonctionnement normal, rouge en partie inférieure et vert en partie supérieure lorsque le parafoudre est en « réserve de sécurité » et assure toujours sa fonction de protection, enfin rouge pour le parafoudre en défaut : changement obligatoire !
Des contacts de télésignalisation autorisent enfin le contrôle à distance de l’état de fonctionnement du parafoudre grâce au câblage d’un contact sec.

Jean-Claude Festinger

 

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