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Dossier - Août-Septembre 2008

Vidéophonie : un monde qui bouge !


Il faut parfois une loi pour faire bouger un marché... En témoigne la loi “handicap” qui devrait donner un véritable coup de fouet à un marché de la vidéophonie encore atone. Par ailleurs, le développement de l’offre numérique s’accompagne de nombreuses fonctionnalités allant jusqu’à former un véritable cœur domotique à l’habitat.

 Photo 01 AIPHONE
La vidéo apporte dans l’appartement ou la maison
une notion de sécurité supplémentaire
et un confort accru lié à des fonctions nouvelles :
multi-caméras, mémorisation des images...

Audio ou vidéo ? Le basculement technologique est engagé. Argument de poids, l’application de la loi imposant l’adaptation des nouvelles constructions aux personnes handicapées et à mobilité réduite, enterre définitivement l’audiophonie pour l’habitat neuf comme pour les rénovations lourdes. Le développement de la vidéo et du numérique amènent aussi des systèmes d’un genre nouveau, dotés de fonctions multiples, où l’ouverture de la porte n’est plus qu’une fonction parmi d’autres. « Aujourd’hui, en résidentiel, nous sommes dans une dynamique d’évolution vers les combinés vidéo, précise Yves Merenda, pdg d’Evicom. En un an, nous avons vendu 30 % de kits vidéo en plus »

 

Sauts technologiques
Ecran Noir & blanc ou LCD couleur ? « Les ventes en volumes pourraient atteindre l’équilibre cette année », précise Laurent Didier, responsable marketing chez Urmet France Captiv. L’écran plat permet aux fabricants de proposer des combinés plus faciles à installer en saillie, car moins encombrants. Mais le prix de la couleur est encore élevé. De plus, tous les écrans ne se valent pas : une bonne luminosité sous un angle de vision relativement large (l’image de l’écran fixe doit être vue par les petits et les grands) reste la caractéristique qui fait la différence entre combinés. D’autant plus que certains produits du marché utilisent des dalles LCD recyclées aux durées de vie plus courtes, avec parfois un nombre élevé de pixels défectueux... « Mais globalement, les produits distribués auprès des professionnels présentent peu d’écarts de qualité, explique un fabricant. Ce qui n’est pas le cas en GSB, où les combinés intègrent des dalles dont le coût d’achat varie parfois de 1 à 6 ! »
Combiné ou main libre ? La mode est à la prise d’appel main-libre : plus besoin de décrocher. Mais pour cela il faudra débourser un peu plus.
Analogique ou numérique ? Là encore, la tendance est au numérique pour un coût global variable suivant la situation. Dans le neuf, la technologie analogique 5 fils reste globalement moins coûteuse. En revanche, en rénovation, le recyclage du câblage de l’interphone audio en bus numérique 2 fils, permet de gagner suffisamment de temps à l’installation pour faire oublier le surcoût de l’équipement numérique.

 

 


Combien de fils ?
Outre la technologie coaxiale, contraignante à poser, il existe des équipements à 2, 4, 5, voire 8 fils. Comment s’y retrouver ? En analogique noir&blanc ou couleur, il est possible de travailler avec une liaison 2 fils. Mais certains fabricants proposent tout de même une solution 4 fils (2 pour la communication et 2 pour l’activation de la gâche de porte). « Bien que nous proposions une offre 2 fils, nous conseillons à nos clients d’opter pour la solution 4 fils, beaucoup moins sensible aux contraintes d’installation », précise François Levy, dirigeant de Techno EM.
Les équipements numériques sont quant à eux câblés à l’aide d’une simple paire téléphonique généralement non polarisée. Cette solution présente surtout un avantage économique en logements collectifs. Techno EM ne dispose pas encore de cette offre à son catalogue Commax, mais songe à la développer.
Bticino utilise principalement un câblage 2 fils non polarisés, torsadés ou non, offrant une liaison de 50 m (situation extrême avec un vieux câblage) à 600 m. « Pour les grandes distances entre une platine et un bâtiment jusqu’à 1 km, nous proposons aussi une offre propriétaire 8 fils », ajoute Antony Rex chez Bticino. Fermax, avec sa gamme MDS sur 5 à 8 fils, cours jusqu’à 1 000 m, sans limitation du nombre de platines.
Urmet France Captiv propose des solutions 2 ou 4 fils pour permettre l’entrée de fonctions multiples d’intercommunication et de vidéosurveillance.
Et la vidéophonie sans fils ? « Nous y réfléchissons, explique Pierre-Antoine Person, chef de produits interphonie chez Hager, spécialiste de l’interphone radio. Car la vidéo est pour nous un challenge important. Mais la vidéo par transfert radio est plus sensible encore aux perturbations et aux distances, c’est pourquoi nous ne voulons pas sacrifier la qualité des échanges. »


 

 

Nouvelles fonctions
Les équipements numériques offrent aujourd’hui toute une palette de fonctions qui viennent étendre les possibilités de l’interphonie. Chez Techno EM, distributeur exclusif des produits Commax, les systèmes filaires 2 ou 4 fils permettent une ouverture sur la vidéosurveillance à l’aide d’écrans partitionnés (jusqu’au nombre de 20 !) pouvant recevoir simultanément les images de 4 caméras. « L’alliance entre vidéo surveillance et interphonie apporte un service supplémentaire, notamment pour les professions libérales », souligne François Levy, dirigeant de Techno EM. Les produits Commax intègrent pour certains une fonction de mémorisation d’image des visiteurs en l’absence de l’occupant. Les portiers Bticino permettent quant à eux d’éclairer automatiquement les parties communes lorsque la gâche ouvre la porte. Ces mêmes équipements assurent intercommunication dans un même appartement, voire entre différents appartements d’un même immeuble.
Ces fonctions concernent aussi la maintenance. Par exemple, pour son offre en collectif, Fermax a lancé sur le marché début 2008 un répartiteur d’étage sur bus 2 fils, capable d’isoler un poste ou une liaison défectueuse. Cette procédure automatique garantie la continuité de service du reste de l’installation et localise l’opération de maintenance à effectuer.

 

Photo 04 TechnoEM
En utilisant une unité centrale, ce système peut gérer jusqu’à 4 caméras et 20 moniteurs.
Le câblage 4 fils en amont de l’unité centrale et 6 fils en aval
nécessite d’employer des sections de cuivre de 0,9 ou 1,5 mm suivant les distances parcourues.

Relais vers téléphone et TV
La vidéophonie prolonge le lien avec l’occupant via des vecteurs de communication tels que le téléphone fixe ou mobile, voire le téléviseur. Aiphone propose un kit vidéo couleur mains libres pour l’habitat individuel : cette offre intègre une nouvelle interface téléphonique sur la ligne fixe (ligne France Telecom, dégroupée en totalité ou partiellement, ADSL...) ou GSM, avec un transfert de ligne activé ou non. Les produits Commax de Techno EM intègrent une base DECT en platine de rue permettant de recevoir les appels sur 3 combinés téléphoniques. Avec les produits Bticino, on pourra aussi effectuer un transfert d’appel vers un téléphone portable ou encore intégrer une caméra supplémentaire privative ou collective. « Ce système permet également de basculer l’image de la platine située dans l’entrée vers la télévision », ajoute Loïc Collas, chef de marché sécurité communication.


Domotique et interphonie
Sans surprise, les systèmes de portier vidéo, empruntent la voie de la domotique. Chez Evicom, il existe des passerelles vers des systèmes domotiques « Mais cela reste sur un marché très limité et plutôt en maison individuelle de standing », explique Yves Merenda. Cet automne, Evicom lance toutefois un moniteur vidéo capable de gérer une alarme.
La gamme Commax de Techno EM propose un système filaire à câblage UTP au départ du combiné intérieur. « Mais nous réfléchissons sérieusement à une solution sans fil ou par courant porteur, avoue François Levy, dirigeant de Techno EM. Nous voulons éviter tout câblage spécifique additionnel qui constitue un des principaux freins à la domotique en Europe. »
Pour Bticino, le moniteur vidéo MyHome devient la centrale de gestion de la maison avec des capacités de pilotage des fonctions de chauffage, de diffusion sonore et la gestion des ouvrants. Les fonctions sont alors adressées par bus 2 fils via les 3 gammes d’appareillage de la marque et aussi à l’aide d’un écran tactile annexe. Outre le bus propriétaire utilisé pour MyHome, Bticino dispose de passerelles vers d’autres protocoles ouverts.
Urmet France Captiv, partenaire officiel de Casanova, développe son offre autour d’applications domotiques de confort et de sécurité : « Notre combiné intérieur se brasse en coffret de communication sur prise RJ45, avec une alimentation Power over Ethernet (PoE), afin de pouvoir l’installer où l’on souhaite dans la maison », ajoute Laurent Didier, responsable marketing.

 

Photo 02 SCHEMA POSE
La réelle prise en compte des personnes handicapées et à mobilité réduite
dans la conception du bâtiment élève le niveau de service de l’interphonie
et introduit la vidéo en lieu et place du combiné audio.

 


Loi handicap … source de discorde ?
« Actuellement, certains installateurs sont déroutés par les différentes interprétations qui sont faites du texte de loi sur l’accessibilité, lance Christophe Melan, directeur général de Fermax France. Fabricants et organismes de contrôle font parfois passer sous couvert de la loi, des caractéristiques qui ne sont qu’interprétation d’un texte, il est vrai, n’est pas assez précis. Pour mettre fin à cette situation pénalisante pour tous, il faudrait enfin nous réunir et convenir une bonne fois pour toutes de ce qui relève du texte de loi et de ce qui tient du confort et des fonctions additionnelles proposées par chacun. Par exemple, qu’est-ce qu’un contraste de couleur ou encore un pré-équipement couleur ? Nous souffrons actuellement du manque de concertation et la situation risque d’être pire en 2009 ! »


 

Photo 05 Evicom

Pour être conforme à la loi accessibilité,
les platines de rue à défilement doivent comporter
un clavier permettant d’entrer directement un code,
notamment pour les personnes mal voyantes.

 

 

 

 

Loi sur l’accessibilité
La loi sur l’accessibilité perturbe actuellement le marché de l’interphonie, du maître d’ouvrage à l’installateur ! L’orientation est claire : l’audiophonie en habitat collectif neuf appartient au passé. En effet, les ouvrages dont le permis de construire a été déposé après le 1er janvier 2007 doivent appliquer des règles permettant de faciliter l’accès et l’utilisation des locaux d’habitation aux personnes handicapées et à mobilité réduite.
Le texte de loi prévoit des aménagements et fonctions d’interphonie spécifiques : technologie vidéo, signalisation sonore et lumineuse sur platine de rue, clavier à code direct pour les platines à défilement de nom, boucle à induction sur les combinés... La facture interphonie passe donc du simple au triple au niveau de l’installation. Et en ce qui concerne les combinés intérieurs, les prix peuvent passer de 1... à 10 ! « Mais ce surcoût passe globalement inaperçu à l’échelle des modifications engendrées au niveau de l’ensemble du bâtiment », souligne certains fabricants d’interphonie.
Cette mini révolution chamboule les catalogues de fabricants et laisse aussi une place à l’interprétation (voir encadré). Certains adaptent leurs produits, d’autres refondent leurs gammes tel Evicom avec son offre Bitron Vidéo. « Depuis mai 2008, nous proposons une famille de platines vidéo et de combinés entièrement conçus pour répondre à la problématique d’accessibilité, lance Yves Merenda, pdg d’Evicom. Nous sommes même allés plus loin que les signaux sonores et lumineux en intégrant la synthèse vocale en standard sur les platines de rue. » Bticino a adapté son catalogue pour proposer platines vidéo, claviers codé sur platine défilante. « Nous concentrons actuellement tous nos efforts sur le thème de l’accessibilité », précise Antoine Pelloux, responsable marketing d’Aiphone, en avouant travailler à présent de façon plus normée sur ce sujet.
Techno EM, qui propose déjà un bouton de platine spécial handicap, un système de badge mains libres et distribue Digiway, un automatisme de porte battante simple ou double, travail sur une prochaine offre de portier répondant à la nouvelle loi. « Le réel démarrage de la demande sera effectif au second semestre 2008 », souligne Loïc Collas, chef de marché sécurité communication chez Bticino, en s’interrogeant sur la notion de rénovation lourde : où commence-t-elle réellement ? En effet, même si les textes évoque un seuil de 80 % du bâti, à partir de quel niveau de rénovation doit-on mettre en conformité l’installation d’interphonie au regard de la loi handicap ? Si seuls les accès sont modifiés, la loi s’applique-t-elle ? « Les organismes de contrôle s’exprimeront... »

 

Photo 06 Fermax
Selon les platines intérieures, le téléphone portable peut servir de relais
pour être prévenu de l’arrivée d’un visiteur, que l’on soit chez soi ou non.
Mieux : le portable doté de la fonctionnalité Bluetooth peut aussi devenir un badge d’accès !.

Un lien avec le contrôle d’accès
« Depuis le début de l’année nous remarquons une demande de plus en plus forte pour le contrôle d’accès en petit et moyen tertiaire, marié à notre offre audio et vidéophonie », livre Antoine Pelloux, responsable marketing d’Aiphone. Aiphone propose la gamme AX et son option ibox permettant un accès par code, badge ou code et badge.
Même tendance observée chez Evicom, où la demande d’offre globale se fait ressentir depuis quelques années : « Aujourd’hui, 75 % des installations collectives sont équipées de contrôle d’accès par clé électronique », précise Yves Merenda, pdg d’Evicom.
« Il faut distinguer pour le contrôle d’accès, 3 types d’utilisateurs : les résidents, les visiteurs et les prestataires », explique Laurent Didier, responsable marketing d’Urmet France Captiv. Suivant les besoins, le système de contrôle d’accès lié au portier vidéo pourra utiliser clés mécaniques, claviers codés, badges enregistrés sur centrale... « Pour gérer l’accès des prestataires, Vigik offre une notion de traçabilité importante. Mais en dehors de la distribution du courrier, cette solution n’est pas encore tellement répandue chez d’autres professionnels. Pourtant, pour les grands bailleurs, il s’agit d’un gage de sécurité qui deviendra de plus en plus une obligation pour les prestataires qui auront à intervenir dans les immeubles. » Lancé il y a 10 ans, le concept Vigik équipe aujourd’hui environ 150 000 immeubles.
Fermax, qui n’est plus seulement présent dans le logement social, mais aussi dans le logement neuf, travaille son offre tertiaire, notamment avec des solutions couplant contrôle d’accès et vidéophonie : « Pour les bureaux, nous avons mis au point un système de contrôle d’accès par reconnaissance Bluetooth, explique Christophe Melan, directeur général de Fermax France. Les collaborateurs peuvent alors s’identifier sans autre badge que leur téléphone portable Bluetooth ! Par ailleurs, nous proposons une offre vidéophonie sur IP : l’image est visible directement sur un PC ! »

 

Michel Laurent

 

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