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 Solution technique - Mars 2020

Le projet d’éclairage : revenir aux fondamentaux


La lumière est considérée comme un bien acquis, facile à obtenir et dont la qualité a longtemps résulté d’études de photométrie et d’éclairagisme précises. L’arrivée de la LED a changé la donne : cette révolution technologique a fait oublier que la qualité de lumière se calculait et que le projet d’éclairage joue un rôle déterminant pour le confort des utilisateurs.


schema solution techniqueLa plupart des informations que nous recevons passent par la vision et pourtant l’œil n’est pas capable à lui seul de mesurer la qualité de la lumière. « Avant l’arrivée de la LED, explique Sébastien Flet-Reitz, directeur technique du Syndicat de l’éclairage, les acteurs de la filière n’avaient pas le choix : les produits à installer étaient sélectionnés selon la technologie des lampes (fluorescence dans les bureaux, lampes à décharge dans l’industrie et à l’extérieur, halogènes dans les commerces, etc.) et en suivant les recommandations de l’Association française de l’éclairage qui, pour quasiment chaque secteur d’activité, donnait des méthodes de calcul pour obtenir une bonne lumière au bon endroit. »
Les optiques étaient d’ailleurs conçues en fonction de leur destination et on pouvait tout de suite savoir si un luminaire était dédié à des équipements sportifs, des bureaux ou des magasins. Aujourd’hui, si la distinction par application persiste, la frontière est fine. Les notions de basse ou très basse luminance par exemple ont été un peu perdues de vue et, bien souvent, un rapide passage par Dialux suffit ou donne l’illusion que c’est satisfaisant.

Le projet : une passerelle vers la qualité
Sébastien Flet-Reitz rappelle les règles élémentaires qui constituent la base d’une étude d’éclairage :
– « dans le cas d’une rénovation, analyser l’existant afin de connaître les coûts de consommation et de maintenance ;
– évaluer les besoins selon le type d’activité et déterminer les niveaux d’éclairement ;
– choisir du matériel adapté
– définir le nombre de luminaires à installer et où les disposer ;
– choisir le système de gestion adapté à l’activité pour la détection de présence, de mouvement, de lumière du jour, temporisation de l’extinction, gradation.
Avoir ces étapes en tête est une assurance supplémentaire de bien réussir son projet et de disposer d’une installation d’éclairage performante et adaptée à son besoin. »
Pour le directeur technique du syndicat, « si les calculs ne sont pas effectués et que l’on n’a pas vérifié que l’on dispose bien de 500 lux dans un bureau par exemple, les collaborateurs peuvent être gênés de ne pas bénéficier d’un éclairage satisfaisant et donc travailler moins efficacement ou ressentir une fatigue visuelle plus rapidement ». Mais cela ne suffit pas. Certes, pendant longtemps, on a cherché à réaliser un éclairage le plus homogène et le plus efficace possible, avec un nombre de watts par mètre carré le plus faible possible.
Aujourd’hui, l’idée est de rendre l’espace de travail ou de vente attractif et confortable, sans renoncer pour autant à l’efficacité, bien sûr. Le processus commence à la maison, comme c’est souvent le cas d’ailleurs, désormais, chacun peut choisir son ambiance, varier les températures de couleur, piloter les intensités selon les pièces ou les espaces, etc., et souhaite bénéficier des mêmes possibilités au travail.
Le projet va donc permettre de déterminer les ambiances en positionnant les luminaires dans telle et telle zones, en orientant la lumière, en créant des contrastes.

Du calcul à la création de bien-être
Le jeu des ombres et accents de lumière n’est pas l’apanage des espaces de détente : au bureau, les activités peuvent être très diverses : travail sur écran, au téléphone, réunions, projections de vidéo, moments de convivialité… Toutes ces ambiances peuvent être révélées par un éclairage adapté : « Des niveaux d’éclairement de 500 lux uniformément répartis n’apportent pas cette qualité de lumière, souligne Sébastien Flet-Reitz, les utilisateurs vont certes bénéficier d’un éclairage efficace et uniforme, mais seront baignés dans une ambiance d’hôpital, froide et monotone. Moduler les ambiances permet d’offrir un confort qui participe au bien-être des utilisateurs et par conséquent à leur productivité. »
Tout cela relève du projet d’éclairage qui va permettre d’évaluer la consommation, de choisir le matériel et d’évaluer les coûts d’investissement et de maintenance, mais pas seulement ; le projet inclut également de la connaissance au sens large, celle de l’éclairagisme, mais aussi des matériaux, des facteurs de réflexion des parois, ouvrant ainsi les portes aux non-spécialistes qui peuvent prendre part au projet, comme les architectes d’intérieur, les urbanistes ou les paysagistes pour l’extérieur qui vont contribuer à créer ces différentes ambiances ou même des identités lumineuses en fonction du domaine d’activité.
« Finalement, le projet d’éclairage, au-delà du calcul, consiste en une réflexion globale sur la manière d’éclairer, les effets désirés, pour ensuite effectuer l’étude qui permettra d’atteindre ces objectifs, commente Sébastien Flet-Reitz, en répondant le plus justement possible aux besoins du moment. » C’est l’association de ce Human Centric Lighting et du projet qui va donner naissance à un éclairage performant et optimisé qui peut transformer un espace fonctionnel en un lieu très récréatif par le simple jeu de la lumière. Force est de constater que la LED a ouvert un vaste champ de possibilités en la matière, avec pour acquis une efficacité énergétique indiscutable, laissant la place à la modularité et la création d’ambiances pour un bien-être accru dans les espaces de travail. Pourtant, dans le même temps, cette technologie aurait, d’une façon indirecte, éclipsé le projet.

renover eclairage plateformes entrepots 1La maturité de la LED ou le retour de l’éclairagisme
Cette efficacité lumineuse élevée qui a servi de tremplin à la LED a également conduit à oublier les règles basiques d’éclairagisme : en effet, au début de la LED, la recherche technologique portait essentiellement sur l’efficacité énergétique avec pour seule exigence le lumen par watt, mais avec une température de couleur froide et peu confortable. Et vers 2014, les produits LED arrivant à maturité, on a pu enfin bénéficier à la fois de flux lumineux élevés et de températures de couleur agréables avec des IRC supérieurs à 80.
Partant d’un certain nombre de paramètres qui représentent les principes de base de l’éclairagisme, le projet permet de répondre à ces questions. En plus de bonnes conditions de travail dans son entreprise, l’exploitant optimise l’efficacité énergétique et les coûts associés à l’éclairage, à condition de procéder à l’analyse des besoins et de faire réaliser le projet d’éclairage par des spécialistes. Mais attention à qui fait quoi (voir tableau) !
Pour Sébastien Flet-Reitz, c’est « grâce à ces progrès que l’éclairagisme, et donc le projet, retrouve sa place, permettant de se poser les bonnes questions : quelles fonctions le luminaire peut-il nous offrir ? Quel mode de pilotage peut-on mettre en place ? Quel confort supplémentaire le luminaire peut-il apporter ? ».

Isabelle Arnaud

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