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 Dossier - Avril 2012

Fibre optique dans l’habitat : déploiement vers le très haut débit


Ramez Fakih, Président Fondateur d’IDFO-Habitat NumériqueEdito

"Fibre optique et habitat : émergence d’un nouveau métier"

Dans l’habitat collectif neuf, le déploiement de la fibre optique peine à trouver un régime de développement en rapport avec le fort potentiel du marché.
De leur coté, les professionnels de l’installation, et au premier plan les installateurs électriciens, n’ont pas encore pris la réelle mesure de cette technologie, comparativement aux techniques électriques, cœur de leur savoir-faire. Les électriciens sont encore loin d’une appropriation à grande échelle de compétences spécifiques en rapport avec des activités numériques. Ces nouvelles compétences s’inscrivent cependant dans la logique d’évolution de leur métier.
Les formations adéquates font encore défaut, notamment du fait d’un manque de sensibilisation. Cela éloigne une frange importante de ces professionnels, qui constituent pourtant la population d’acteurs la mieux placée pour prendre part au déploiement de la fibre, grâce à leur proximité avec le client. Proximité qui pourrait faire d’eux des prescripteurs capables de contribuer efficacement à la dynamique du marché.
C’est pourquoi IDFO-Habitat Numérique* n’a de cesse de multiplier les débats et les réunions de sensibilisation des professionnels de la filière à la fibre optique. Trois thèmes principaux rythment nos rencontres : l’opérateur d’immeuble acteur clé du très haut débit ; l’émergence d’un nouveau métier, le développement du marché de la fibre optique.
Nous insistons notamment sur le rôle clé dévolu à l’opérateur d’immeuble et à la mise en lumière d’un nouveau métier dont le périmètre d’activité élargi dépasse le fibrage de l’immeuble. En effet, nous avons la conviction qu’émerge un métier répondant aux besoins du logement en matière de services « triple Play » et de services de gestion technique, à proposer simultanément. Une association qui pourrait séduire le client et accélérer le déploiement de la fibre optique. Ce concept fait se rejoindre les technologies fibre optique et domotique dans le cadre de ce nouveau métier que nous baptisons « opérateur fibrotique ».
IDFO-Habitat Numérique fait en sorte de donner corps au concept d’« opérateur fibrotique », par un cadrage des compétences requises, optique et domotique combinées, afin d’alléger la chaîne des intervenants. Pour cela, nous travaillons à la création d’un « Certificat Professionnel de Capacité Fibrotique », délivré aux entreprises afin de rassurer les donneurs d’ordres sur la qualité des prestations.
Enfin, sur le plan opérationnel, les acteurs « naturels » de la construction manquent encore d’informations et de documents de référence unifiés pour pré-équiper massivement et efficacement les immeubles en construction. C’est dans l’optique de contribuer à lever ces freins, dans l’intérêt d’une filière naissante et des usagers que nous élaborons actuellement un « Référentiel FttH » pour le pré-équipement et le contrôle conformité. Ce document sera mis à disposition de l’ensemble des acteurs de la construction.

Ramez Fakih, Président Fondateur d’IDFO-Habitat Numérique
* Institut pour le développement de la fibre optique et des services liés dans l’habitat numérique.


Fibre optique dans l’habitat : déploiement vers le très haut débit


Le corpus réglementaire étant depuis peu clarifié, la fibre optique dans l’habitat entame aujourd’hui une large phase de déploiement. Grâce au FTTH, les débits proposés par les opérateurs pourront progressivement monter en puissance en lien avec une palette de services elle aussi appelée à rapidement évoluer.

 

Photo 01 LEGRANDLe FTTH (Fiber To The Home), commence réellement à se développer en France. Actuellement plafonné à 100 Mbits, le débit disponible en bout de fibre pourrait à terme atteindre plusieurs Gigabits ! D’où la nécessité aujourd’hui d’équiper les logements d’installation de communication grade 2 ou grade 3, sachant que le grade 1 deviendra un goulot d’étranglement à 100 Mbits. Mais revenons à la fibre et à son déploiement dans les différentes situations existantes.

 

Logements neufs : obligation depuis le 1er avril 2012
Photo 02 LEGRANDLe décret du 14 décembre 2011 « multifibrage des logements neufs » est paru au J.O.R.F. du 16 décembre dernier. Le décret n° 2011-1874 modifie l’article R.111-14 du Code de la construction et de l’habitation. Ce texte introduit le multifibrage des logements neufs, en donnant la possibilité de mettre en place jusqu’à 4 fibres par logement dans les zones à forte densité de population. Pourquoi 4 fibres ? Simplement pour que chaque opérateur télécom puisse accéder aux clients.
Ce décret concerne les modalités de déploiement du très haut débit en fibre optique dans les constructions neuves de bâtiment à usage principal d’habitation. Les dispositions sont applicables aux bâtiments qui feront l’objet d’une demande de permis de construire déposée à partir du 1er avril 2012. Sont concernés : les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre, les constructeurs et promoteurs, les entreprises du bâtiment et les opérateurs de communications électroniques.
Rappelons que la loi du 17 décembre 2009, relative à la lutte contre la fracture numérique, introduit l’obligation pour toute personne établissant des lignes de communication à très haut débit en fibre optique d’en permettre l’accès à tout opérateur qui en fait la demande.

 

Immeubles neufs et existants : qui fait quoi ?
Dans les immeubles existants, l’installation du câblage fibre optique entre le pied d’immeuble et le coffret d’étage est à la charge de l’opérateur commercial qui contractualise son rôle d’opérateur d’immeuble avec le syndic de copropriété. Il installe alors la colonne montante à ses frais. Ensuite les opérateurs commerciaux installent les liens horizontaux (entre le coffret d’étage et le tableau de communication) pour leurs clients respectifs.
Dans le cas d’un immeuble neuf, et selon les conditions définies par les textes officiels, le rôle de l’opérateur d’immeuble est attribué au promoteur. Ce dernier a la charge de faire installer les liaisons fibre optique entre le coffret ou l’armoire de mutualisation et le tableau de communication de chaque logement (DTIO).
Quelle place pour l’installateur électricien ? Aujourd’hui encore, l’électricien est peu impliqué dans le déploiement de la fibre optique, notamment du fait d’un manque de formation et surtout de la nécessité de réaliser des soudures (fusion entre fibres) qui nécessitent un investissement avoisinant parfois 15 k€… L’épissure mécanique reste plus accessible (2 k€ d’investissement en outillage), mais présente l’inconvénient d’affaiblir le signal. Pourtant, l’électricien est au cœur du débat sur le haut débit. Cependant, il y a fort à parier que l’offre des fabricants se développe autour de liaisons optiques préconnectorisées aux deux extrémités. Dans ce cas, il sera possible de passer outre la soudure optique. Dans l’immédiat, l’électricien peut toutefois installer des DTIO et placer la rocade de fibres en attente dans le coffret de palier… Ce sont donc les opérateurs ou leurs sous-traitants spécialistes de la fibre optique qui réalisent les soudures de raccordement entre la fibre de l’abonné et la colonne montante ou l’armoire de mutualisation.
De la même façon, on observe aujourd’hui qu’en dehors des DTIO, les produits concernant la fibre optique sont peu introduits dans la filière distribution électrique. Armoires, coffrets et câbles de colonne montante transitent directement et dans la majorité des cas par les opérateurs télécoms et les intégrateurs… Mais le marché pourrait vite évoluer.

 


 

Parmi les acteurs…
Photo 03 LEGRANDCâblier et fournisseur d’accessoires télécoms, Nexans s’est orienté vers des solutions de câblage optique globales au travers de sa marque Kinoptic couvrant l’ensemble de l’infrastructure FTTH. Depuis fin 2008, Nexans collabore avec Sumitomo dans le domaine des câbles à fibre optique pour les réseaux terrestre européens. Cet accord concerne plus spécifiquement le déploiement des réseaux en fibre optique jusque chez l’abonné (FTTH) et plus généralement l’ensemble des applications FTTx.
Le groupe Prysmian, propose aujourd’hui un catalogue de produits optiques dans le cadre de son offre FTTH baptisée Verticasa pour immeubles collectifs comprenant : boîtiers de mutualisation en pied d’immeuble, câbles optiques de colonne montante, boîtiers d’étage et câbles horizontaux de raccordement d’abonnés et prises terminales
Casanova, acteur des courants faibles et du coffret de communication, est pleinement investi dans le déploiement de la fibre optique, dans la perspective d’une augmentation des débits. Aujourd’hui à 100 Mbits, l’offre fibre optique ne pourra que monter en puissance et atteindre progressivement le gigabit pour répondre aux nouveaux besoins des utilisateurs domestiques. Casanova propose l’offre Verticasa, un concept développé en interne sur la base de fibres Prysmian. Précisons que cette offre, dédiée aux installateurs, est toutefois différente de l’offre du même nom développée par Prysmian pour les opérateurs telecom.
Legrand, spécialiste des courants faibles dans le logement, intègre l’offre DTIO pour la partie privative du logement, avec la possibilité de dérouler la fibre jusqu’à l’armoire de mutualisation en pied d’immeuble. Le fabricant ne propose cependant pas d’armoire ni de coffret optique de raccordement pour la colonne montante.
Michaud, comme d’autres fabricants de la filière électrique, observe avec attention le marché de la fibre optique…

 

Lien en pied d’immeuble
Photo 04 CASANOVA VERTICASAEn pied de colonne montante de l’immeuble ou sur le domaine public pour plusieurs immeubles lorsque ceux-ci regroupent peu de logements, une armoire optique permet de connecter les fibres issues des terminaux des opérateurs aux fibres qui seront distribuées dans chaque logement.
« Pour l’habitat existant de moins de 12 logements, Nexans propose une armoire de mutualisation de brassage optique à disposer sur le domaine public, explique Xavier Renard, responsable produits marketing FTTH chez Nexans. Cette armoire intègre ou non un switch optique nécessaire à la répartition optique pour l’opérateur Free. À cette armoire s’ajoute un boîtier à disposer près de l’immeuble pour réaliser les soudures. »
Pour les immeubles de plus de 12 logements, un boîtier de mutualisation, ou bien au-delà de 48 logements, une armoire de mutualisation PRI/PMI, se placent à l’intérieur. Cette solution passive d’interconnexion pour les réseaux FTTH assure la délimitation entre les fibres abonnés en aval, et les fibres opérateurs en amont. Sa principale fonction : permettre aux différents opérateurs de se raccorder, à la demande, à n’importe quel abonné.
En pied d’immeuble, Prysmian dispose d’armoires de mutualisation avec ou sans coupleur (permettant l’éclatement du signal optique, notamment pour les opérateurs France Telecom et SFR).

 


 

La colonne montante et jusqu’au DTIO
Photo 05 WEIDMULLERLa colonne montante permet de distribuer et de répartir 1, 2 ou 4 fibres par logement (chacune étant attribuée à un opérateur). La répartition s’effectue avec ou sans boîtier d’étage jusqu’au DTI optique (DTIO). Dans certains cas, la fibre se termine par une prise murale optique. En général, le DTIO ou la prise murale sont livrés avec une réserve de fibre connectée coté utilisateur, il suffit ensuite de dérouler cette fibre jusqu’au boîtier d’étage. Elle reste alors en attente d’une soudure (réalisée par l’opérateur du client avec la bonne fibre issue de la colonne montante. Dans d’autres cas, la fibre peut être déroulée jusqu’à l’armoire optique de pied d’immeuble.
Dans le neuf, en fonction de l’ingénierie du chantier, Nexans propose des câbles optiques de colonne montante mono, bi ou quadri-fibre, pré-connectorisés ou non. Quant aux passages des fibres dans les colonnes montantes existantes, une offre de pieuvre baptisée Clink intègre des câbles préconnectorisés permettant d’éviter la réalisation d’épissures sur le terrain lorsque des connecteurs sont nécessaires. Ainsi le temps d’installation est considérablement réduit. Les connecteurs sont montés et polis en usine, directement sur les fibres issues du câble.

 

Tableau des offreurs

 



Au niveau du palier, un boîtier d’étage VertHor gère la distribution du câble (extraction de la fibre) de colonne montante vers le logement des abonnés. Relativement universel, il accueille 1, 2 ou 4 fibres par abonné. Ce boîtier se trouve dans la gaine technique, ou éventuellement contre la goulotte montante avec dans ce cas des jupes d’épanouissement. À cet endroit s’effectue la soudure entre la fibre de la colonne montante et la fibre de l’abonné issue du DTIO ou de la prise terminale optique.

 


Photo 06 CASANOVA« Dans le neuf notamment, lorsque la goulotte de la colonne montante est suffisamment large, on peut se passer de la présence du boîtier d’étage, souligne Xavier Renard. Parfois aussi, notre kit DTIO permet de dérouler la fibre du coffret de communication jusqu’au pied d’immeuble dans l’armoire de mutualisation. »
Chez Prysmian, un câble fibres optiques de colonne montante comprend de 12 à 144 fibres. Côté boîtier de mutualisation, ces câbles sont souvent préconnectorisés. Un choix de quelques longueurs de câbles de colonne montante permet de trouver le bon compromis en rapport avec la hauteur de l’immeuble. Le kit de raccordement abonné, à poser dans son coffret de communication ou directement via une prise terminale optique murale, est ensuite déroulé jusqu’au boîtier d’étage en attendant de souder les fibres du câble de branchement sur celle du câble de la colonne montante. « Depuis plusieurs années, notre offre intègre de la fibre G657A2 qui a l’avantage de se plier, sans prise d’atténuation selon un rayon de courbure de 7,5 mm », ajoute Marc Leblanc, directeur commercial de l’activité télécom chez Prysmian. Cette fibre est préconisée par l’Arcep et, compte tenu de ses performances très bien adaptées à un environnement FTTH, les opérateurs l’ont très majoritairement adoptée, non seulement pour le câblage d’immeubles mais aussi pour le réseau horizontal extérieur.


« Nous disposons aussi, pour les zones pavillonnaires, de kits de raccordement abonné constitués d’un câble pour installations intérieure et extérieure, résistant entre autres aux chocs et à l’humidité. »
Préfabriquée et testée en usine, l’offre de câblage optique clé en main Verticasa diffusée par Casanova pour les colonnes montantes ne nécessite que 1 à 4 soudures par abonné au niveau du palier d’étage. En pied d’immeuble, le raccordement au coffret de mutualisation Casanova s’effectue depuis le coffret opérateur par simple brassage optique. « Une offre de ce type, lancée depuis bientôt 2 ans, contribue à accélérer le déploiement du marché, précise David Dray, pdg de Casanova. Nous travaillons pour cela avec la distribution électrique qui organise les livraisons sur chantier, notamment avec Sonepar, Alliance Com, Socoda ou Francofa… »


Photo 07 FLUKE NETWORKSCasanova fait réaliser ses câbles optiques selon les spécifications des opérateurs. « Avec la possibilité d’intégrer une micro-gaine de 1 à 4 fibres par logement, et non de 12 fibres par micro-gaine, comme cela est proposé habituellement sur le marché. »
L’offre DTIO de Legrand intègre une réserve de 30 m de fibre (de la fibre G657A2 peu sensible au rayon de courbure). « Nous avons disposé la prise de test équipée d’un volet sur la face inférieure du DTIO, explique Pascal Perrin, responsable marché offre fibre optique chez Legrand. De cette façon, le signal optique ne peut, par inadvertance, atteindre la rétine de l’utilisateur lors d’opérations de branchement ! ». Installé dans le coffret de communication, ce DTIO peut être directement relié à un support de box opérateur conçu pour faciliter le retrait et le placement d’une nouvelle box, par exemple pour le secteur locatif. Ce support à fixer dans la GTL comme un coffret de communication dispose de 2 prises de courant et d’une arrivée des signaux sur média cuivre et fibre optique.
Les coffrets de communication en kit n’intègrent pas encore le DTIO, une situation qui pourrait évoluer dans l’offre 2013 du fabricant.

Michel Laurent

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