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Dossier - Janvier-Février 2012

Véhicules électriques :
stratégies et offres en matière d’infrastructures de recharge


La filière électrique s’investit dans le déploiement des infrastructures de recharge des véhicules électriques (IRVE). Depuis le 1er janvier 2012, les premiers textes concernant l’installation de recharge entrent en application. Les fournisseurs proposent sur le marché leurs premières offres structurées de solutions. En 2012, prises, coffrets et bornes seront pour la plupart disponibles. Le point sur la stratégie de plusieurs fabricants.

Les véhicules électriques et hybrides rechargeables arrivent aujourd’hui sur le marché dans un contexte qui dépasse de loin l’expérimentation, comme cela fut le cas il y a une quinzaine d’années. Se pose alors la question de la charge des batteries : à domicile, sur son lieu de travail, sur la voie publique ou encore dans les parkings privés. Cette diversité de situations induit une diversité toute aussi grande de modes de charge et de puissance mises en jeu…

 

Quelles stratégies chez les fabricants ?
ABBRémi Heidelberger, chef de produits infrastructures de recharge des véhicules électriques au sein de la division basse tension chez ABB déclare : « En France, nous avons pour ambition de nous positionner sur le marché de la borne de recharge, du marché résidentiel jusqu’au grand tertiaire. Il s’agit d’un complément de gamme logique au sein de notre offre. Dans la pratique, nous aborderons d’abord le marché de la voirie, des parkings et du collectif privé, avec une offre de 3 à 100 kW qui témoignera d’une importante valeur ajoutée en matière de protection électrique et de communication avec le véhicule électrique. Viendra ensuite le temps du marché résidentiel. »


Frédéric Schekler, directeur marketing et distribution France de GE Industrial Solutions, division de GE Energy explique : « Nous considérons le véhicule électrique dans le cadre d’une stratégie globale impliquant plusieurs divisions : GE Industrial Solutions pour l’infrastructure de recharge électrique, GE Digital Energy pour le comptage intelligent et les logiciels de gestion des réseaux, GE Fleet à propos de gestion de flottes de véhicules électriques ou encore GE Capital avec le financement des véhicules. GE Energy, fabricant d’appareils basse tension, s’appuie sur des partenariats avec des distributeurs et des installateurs, qu’ils soient locaux ou nationaux. En entrant sur le marché par les flottes de véhicules d’entreprises, nous sommes aussi appelés à faire poser des bornes au domicile des collaborateurs utilisant les véhicules. D’où la capillarité du marché. » GE Industrial Solutions propose une gamme de bornes sur le marché européen utilisant le mode 3. « Notre offre Durastation est cependant équipée de prise de recharge de type 2. La future gamme Wattstation sera montée avec câbles attachés en prise de type 2 et type 3 avec des versions smart et connectés au réseau. »


GE 2Depuis un an maintenant, Hager a formalisé une nouvelle division baptisée EVCS (solutions de charge pour véhicules électriques). À sa tête, Marc Helfter précise la stratégie de Hager : « Nous abordons les infrastructures de recharge en cohérence avec notre offre d’équipement électrique pour le bâtiment, c’est-à-dire dans le cadre des marchés résidentiel et tertiaire. Nous arriverons sur le marché au second semestre 2012, tout d’abord avec une offre résidentielle mettant en œuvre les modes de recharge 2 et 3. En apportant plus qu’une simple prise, ces bornes donneront accès à une logique de système d’installation qui permettra de gérer l’énergie. »

 

Et sur la voirie ?
HAGER« Malgré certaines expériences déjà menées, nous ne percevons pas un large potentiel pour les bornes accessibles directement sur la voirie. Il faut juste se demander qui investit et pour quelle rentabilité. Le problème est avant tout économique. Le marché concerne peut-être plus les parkings privés à même de proposer un service supplémentaire ou alors les flottes d’auto-partage. »


Laurent Robichez, responsable marketing pôle enveloppes et mise à disposition au sein de la Division Edia(1) de Legrand : « Nous considérons le point de recharge comme étant un élément de l’infrastructure électrique du bâtiment, avec des spécificités propres et nécessitant un traitement dans les règles de l’art. Par ailleurs, nous sommes persuadés que le déploiement de l’infrastructure de recharge est une condition clé du succès du véhicule électrique. Concrètement, nous souhaitons rapidement proposer une gamme de solutions étagée jusqu’à 22 kW, selon les modes 1, 2 et 3. »

 

Tableau non exhaustif de l'offre sur le marché Français


LEGRANDLEGRANDLegrand a fait le choix de proposer un couple prise + fiche Green Up Access de type 2P+T ouvert aux modes 1 et 2 afin de mettre à disposition une solution simple à raccorder sur une ligne électrique dédiée. « Recourir aux modes 1 et 2 est une façon de développer plus rapidement le marché des IRVE en alliant simplicité et sécurité », souligne Laurent Robichez. Green Up Access met en œuvre une reconnaissance magnétique du socle par la fiche, qui transmet ainsi un signal au boîtier électronique (intégré au cordon ou au véhicule). L’électronique embarquée lance alors une recharge jusqu’à 14 A. Par défaut et sans signal spécifique, le véhicule limite sa charge à 8 A afin de rester dans les limites de puissance d’une prise de courant standard. « Au-delà de cette solution, nous sommes cependant très favorables au mode 3 qui permet des puissances de charge supérieures et offre plus de fonctionnalités. »


Vincent Brunel, responsable de l’activité infrastructure de recharge des véhicules électriques chez Schneider Electric : « Dans un premier temps, nous avons pour objectif de fournir les IRVE en réponse aux besoins de puissance électrique pour les utilisations professionnelles des véhicules électriques. C’est là que se situe actuellement la croissance du marché. Il existe aussi un marché important au regard des parkings privés à usage du personnel des entreprises ou des parkings en délégation de service public offrant des services de recharge. Les centres commerciaux, la grande distribution ou encore les chaînes de restauration sont également dans la logique de déploiement des bornes de recharge. Quant au marché de l’utilisation domestique, nous pensons qu’il se déploiera réellement à partir de 2015. »

 


Types de prises… et modes de recharge

Les prises :
• type 1 : interface standard jusqu’à 16 A (connecteur utilisé au Japon et aux États-Unis) ;
• type 2 : interface de base dédiée au véhicule électrique, jusqu’à 32 A. Fonction pilote et proximité (connecteur utilisé par Mennekes, notamment en Allemagne) ;
• type 3 : interface universelle dédiée au véhicule électrique. Haute puissance en développement. Connecteur utilisé notamment en France et promu par l’EV Plug Alliance (2).

Les modes de recharge :
• mode 1 : prise domestique monophasée non dédiée avec conducteur de terre et d’alimentation ;
• mode 2 : prise domestique monophasée non dédiée avec dispositif de contrôle communicant incorporé au câble. L’intensité de charge est limitée à 8 A ;
• mode 3 : prise spécifique sur borne et sur circuit dédié. Une fonction de contrôle de recharge est intégrée au socle de prise ;
• mode 4 : station courant continu. Branchement sur véhicule sur un chargeur externe équipé d’un câble fixe spécifique.

 

Pour les modes 1 à 3, la norme NF C 15-100 introduit l’idée de circuits spécialisés directement issus du tableau de répartition.


 


Gestion énergétique et gestion d’accès
Au-delà de la recharge, les équipements utilisés pour les IRVE doivent permettre de gérer l’appel de courant. Pour les bornes en grappe, cette gestion s’effectue en relation avec la puissance maximum disponible à chaque instant. La gestion introduit aussi la notion d’accès et de facturation, entre autres dans les parkings collectifs publics ou privés.
Installée au domicile ou en entreprise, la borne de recharge individuelle Hager peut disposer d’une option « Mode économique heures creuses » avec charge décalée ou encore d’un contrôle d’accès pour les bornes disposées dans un espace collectif.


SCHNEIDER ELECTRIC IrveVincent Brunel, Schneider Electric : « Si les applications domestiques nécessitent une gestion énergétique principalement en lien avec les heures creuses, ce sont surtout les applications professionnelles qui vont poser d’importantes contraintes de puissance. Cela nécessite le déploiement de systèmes de recharge capables de considérer la puissance disponible sur le site, rapportée aux pics de charge. Ainsi, il existe des solutions capables, non pas d’interrompre la charge des batteries, mais plutôt de faire varier la puissance de charge. »


SCHNEIDER ELECTRIC IrveAfin de gérer les bornes, Schneider Electric propose des outils logiciels totalement dédiés et personnalisés par usage. Ces outils sont mis en œuvre sur base web et accessibles via un serveur Schneider Electric. Par exemple, dans l’habitat collectif, une armoire de grappe permet à un syndic de gérer plusieurs bornes accessibles par carte RFID. Le syndic peut ensuite facturer aux utilisateurs un service comprenant à la fois l’énergie consommée et l’amortissement de l’infrastructure.
Chez Legrand, on estime qu’un véhicule en charge induit, par exemple, la nécessité de gérer l’énergie au regard des pics de consommation, du coût de l’énergie et du type d’infrastructure sur lequel il est raccordé.

 

Des partenariats pour le déploiement
Hager fait l’objet d’un numéro d’agrément chez PSA dans le cadre de l’équipement des concessions avec des bornes en mode 2 ou mode 3. « Nous allons par ailleurs entamer un travail de prescription avec les concessionnaires des différents fabricants de véhicules électriques, avec pour objectif de faire le lien entre l’acte d’achat du véhicule et l’installation des bornes privatives. »
Schneider Electric propose par ailleurs des formations pour les installateurs, afin de les qualifier au standard « ZE ready » de Renault, quant à la mise en œuvre d’infrastructures de recharge. « Chez Renault, nous avons mis en place un outil Internet permettant aux concessionnaires d’orienter les acquéreurs de véhicules électriques vers des installateurs répondant à ce standard. Il s’agit de 800 installateurs pour le secteur résidentiel et de 200, mais bientôt plus encore, pour les installations professionnelles. » Enfin, Schneider Electric s’est également inscrit dans le processus de diagnostic maintenance avec Renault et Nissan.
Pour leur part, les divisions de GE impliquées dans le développement du véhicule électrique et PSA ont signé un accord de coopération commercial et technologique européen à l’automne dernier. Les deux partenaires entendent travailler conjointement au déploiement d’une offre commerciale destinée aux clients de PSA associant le véhicule électrique à l’infrastructure de recharge.


Michel Laurent

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